L’audacieuse réquisition de l’or américain par Roosevelt : une mesure d’urgence en temps de crise

L’audacieuse réquisition de l’or américain par Roosevelt : une mesure d’urgence en temps de crise

Une décision sans précédent face à la Grande Dépression

En pleine tourmente économique des années 1930, le président américain Franklin Delano Roosevelt prit une décision extraordinaire qui bouleversa le rapport des Américains à l’or. Cette mesure drastique, souvent méconnue, constitue l’un des épisodes les plus remarquables de l’histoire financière américaine et illustre comment, en période de crise majeure, même les valeurs refuges les plus établies peuvent être soumises à l’autorité politique.

La nationalisation de l’or privé

Le 5 avril 1933, quelques semaines seulement après son investiture, Roosevelt signa le décret présidentiel (executive order) 6102. Invoquant une « urgence grave », le nouveau président interdisait aux citoyens américains de posséder plus de 100 dollars en or (équivalant à environ 2200 euros actuels), soit approximativement 156 grammes du métal précieux par personne.

Cette limitation drastique s’appliquait aux pièces d’or, aux lingots ainsi qu’aux certificats attestant la propriété d’or. Les Américains disposaient d’un délai extrêmement court – jusqu’au 1er mai – pour déposer leur métal précieux auprès de leur banque ou directement aux guichets de la Réserve fédérale (Fed).

Un contexte d’urgence nationale

Cette mesure extraordinaire intervenait dans un contexte particulièrement critique. Trente-six heures seulement après sa prestation de serment, Roosevelt avait déjà dû ordonner la fermeture temporaire des banques pendant une semaine pour éviter une panique généralisée et des retraits massifs qui auraient pu conduire à l’effondrement complet du système bancaire américain.

La confiscation de l’or visait principalement à renforcer les réserves de la Fed, gravement épuisées par la crise. Cette centralisation des ressources aurifères devait permettre au gouvernement fédéral de reprendre le contrôle de la politique monétaire dans un contexte où l’étalon-or limitait considérablement les options disponibles pour stimuler l’économie.

L’or : valeur refuge sous contrôle politique

Cet épisode historique rappelle une vérité fondamentale souvent oubliée : même l’or, considéré comme la valeur refuge par excellence en période d’incertitude, n’est jamais totalement à l’abri des interventions gouvernementales. Sa valeur et sa possession peuvent être réglementées, voire restreintes, lorsque les circonstances l’exigent aux yeux des autorités.

La décision de Roosevelt, bien que controversée à l’époque, s’inscrivait dans une stratégie globale pour sortir les États-Unis de la Grande Dépression. En centralisant les réserves d’or, le gouvernement américain cherchait à retrouver une marge de manœuvre monétaire et financière pour mettre en œuvre les politiques économiques expansionnistes du New Deal.

Un précédent historique dans la gestion des crises

Cette nationalisation temporaire de l’or privé américain constitue un exemple frappant des mesures exceptionnelles que peut prendre un gouvernement face à une crise économique majeure. Elle illustre également comment les instruments financiers traditionnels, même les plus solides, peuvent être redéfinis par l’action politique en temps de crise.

Cet épisode historique continue de fasciner les économistes et historiens, car il démontre l’équilibre délicat entre la liberté économique individuelle et les impératifs collectifs en période d’urgence nationale.